Ce soir, la République végète...

Aujourd'hui, le Premier ministre s'est adressé aux parlementaires. Sa survie était entre les mains des Républicains et du Parti socialiste. Les deux étaient indispensables pour lui donner une chance d'opérer et de durer au-delà de jeudi.
Aujourd'hui, nous avons donc entendu le Premier ministre s'exprimer au députés socialistes. Finalement, bien plus qu'à tous les autres.
Le député Philippe Brun évoquait, peu après la chute du gouvernement Bayrou, trouver une position intermédiaire entre les 40 milliards d'économies préconisés par ce dernier et les 20 millions avancés par son parti, le PS. Il a obtenu gain de cause. Le plan Lecornu prévoit une levée de 31 milliards d'euros, 17 sous la forme de réductions de dépenses, 14 provenant de ressources (fiscales, bien entendu) supplémentaire. Victoire du PS.
Le Parti socialiste exigeait la suspension de la réforme des retraites. Victoire du PS. Au grand dam des Français, à qui l'on proposera ensuite un âge de départ de 67 ans, et bientôt de 73 ans, parce que personne n'aura eu le courage d'ouvrir une lucarne vers l'usage d'une dose de capitalisation.
Le Parti socialiste exigeait la hausse du pouvoir d'achat pour les bas salaires. Victoire du PS.
Le Parti socialiste exigeait une contribution des grandes fortunes. Victoire du PS. On pourrait en reparler, il n'est pas formellement inimaginable d'envisager un tel mécanisme, mais le danger arrive très vite de constituer un frein à l'investissement en France par des Français. N'oublions pas que les augmentations d'investissement sous Macron viennent de l'étranger et mettent à mal notre souveraineté économique.
Quatre grandes victoires pour le camp de François Hollande et d'Olivier Faure.
Du côté des Républicains, aucun gage n'a été donné. Ni sur la sécurité, ni sur l'immigration, ni sur l'école, ni sur la diversité des territoires, ni sur la culture, ni sur la souveraineté au-delà des aspects économiques.
Du côté de la préservation de l'Animal et de la Nature, c'est le néant. Les mots n'ont même pas été prononcés. Je retiens, en pensant au corpus des Universalistes - Hommes Animaux Planète, qu'alors que le travail et l'entreprise ont été évoqués, aucune feuille de route n'est prévue sur la participation salariée, qui aurait pu répondre à bien des questions posées par le même Premier ministre.
S'agissant du positif, je ne vois que les points suivants :
- un projet de loi de lutte contre la fraude sociale ET fiscale vient d'être déposé.
- la taxation des entreprises a été étudiée, avec une baisse sur les PME (CVAE) et une hausse provisoire sur les très grandes entreprises. Une direction compréhensible, bien que le reportage de ce soir sur TF1 semble indiquer que l'impact réel sera limité.
Autant le dire clairement : c'est court.
La question n'est pas de savoir s'il faut soutenir ou rejeter ce gouvernement. La direction budgétaire indiquée par M. Lecornu ne relève ni de l'ambition, ni de la justice, puisque les recettes sont réalisées sur le dos de populations en difficulté : autoentrepreneurs, accidents du travail, personnes fortunées même celles qui gagnent leur argent honnêtement. Même si certains visages du gouvernement sont intéressants, cette feuille de route ne peut être soutenue, et la perspective de nouveaux caprices du Parti socialiste laissent croire au pire pour le budget finalement voté.
Mais il s'agit de savoir si une censure va réellement changer les choses. Je ne le crois absolument pas. D'abord parce que son organisation, couplée au report du budget, pèseront sur nos finances. Ensuite, parce que les équilibres politiques ne bougeront que très partiellement :
- Le PS et Place Publique présenteront de nombreux candidats contre ceux de LFI (le PS a même précisé présenter des candidats contre les députés LFI sortants). Par conséquent, de nombreux LFI ayant accédé artificiellement au second tour pourraient s'en voir écartés. Mais le PS ne subirait ce phénomène qu'à la marge.
- Par conséquent, de nombreux députés RN élus face à des candidats de gauche se retrouveront opposés au centre ou à la droite, avec des chances très amoindries de réélection. Oui, le score national du RN restera élevé au premier tour. Mais le second sera décisif. Et le résultat ne pourrait entraîner qu'une percée contenue par rapport au nombre préexistant de parlementaires.
- Restent encore les cas du bloc central et LR. Ensemble ils perdront des plumes mais en gagneront d'autres. La question est celle de l'équilibre entre ces deux blocs. Se dirige t-on vers une égalisation ? Ou les mouvements récents de LR agiront en leur défaveur ?
Dans tous les cas, l'ingouvernabilité ne sera très probablement remplacée que par une autre ingouvernabilité. Et où notre progression nous aura t-elle amenée ? Au point de départ.
Cocasse situation politique !